Municipalité d’Angers : l’inculture aux commandes

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En annonçant officiellement la baisse de deux tiers de la subvention de la ville à Angers-Nantes-Opéra (ce qui revient de fait à y mettre fin du côté angevin) au nom d’une logique comptable des plus contestable, le maire d’Angers dévoile ce que sont ses choix réels en matière de vie de la cité. Son autoritarisme vis-à-vis du directeur de l’ANO révèle également le peu de cas qu’il fait du débat démocratique...

Le syndicat mixte Angers-Nantes-Opéra a été créé en janvier 2003 par les villes d’Angers et de Nantes. Il a depuis permis aux amateurs d’opéra et à un nouveau public d’accéder à prix modeste à des spectacles de qualité impliquant les instrumentistes -en général de l’ONPL-, des chanteurs professionnels -dont beaucoup de jeunes- et de nombreux techniciens. C’est une pièce importante de la vie culturelle angevine aux côtés de l’ONPL, du Quai, du CNDC, du Chabada, etc. et y toucher revient à fragiliser l’ensemble de l’édifice avec lequel elle est en résonance. Aussi, l’annonce au début de l’été que la nouvelle municipalité UMP entendait baisser drastiquement la subvention de la ville à l’ANO ne concerne pas que l’opéra : c’est toute la vie culturelle de la cité qui est menacée par ricochet.

Même sous la précédente municipalité PS, la subvention de la ville d’Angers à l’ANO n’a jamais été à la hauteur de ce qu’elle aurait dû être (1,5M€ pour un tiers des représentations quand Nantes apportait 4,5M€). C’est pourquoi la baisser d’un million d’euros comme vient officiellement de l’annoncer le maire Christophe Béchu (cf. Courrier de l’Ouest du 20/09/2016) est un véritable coup de poignard dans le dos de l’art lyrique. L’argumentation purement comptable développée par le maire est elle-même un scandale. Suffisamment habile pour ne pas comparer la subvention de l’ANO avec celle que la ville verse au football professionnel (au détriment, d’ailleurs, du sport amateur), à Terra botanica, à la vidéo-surveillance ou à ce que coûte la première heure de parking gratuite en centre-ville (>0,5M€ selon ses services), C. Béchu la compare à celle de l’ONPL. Comme si l’opéra qui rassemble toute une équipe de musiciens, de chanteurs, de metteurs en scène, de costumiers, d’éclairagistes, etc. n’était pas par nature plus coûteux qu’un concert symphonique ! Pire, dans une phrase empreinte de mesquinerie et proche de la logique déployée habituellement par le Front national, il reproche à l’ANO d’accepter des spectateurs venus de “Saumur ou d’ailleurs” alors que ces villes, en quelque sorte étrangères, ne contribuent pas à l’ANO ! [1] Le même, au mépris de toute considération sociale, se félicite de faire “des économies sur le personnel” au Quai. Enfin, il s’en prend nommément au directeur général de l’ANO, Jean-Paul Davois, pour avoir osé déplorer publiquement que son outil de travail soit piétiné sans ménagement. Brandissant un prétendu “devoir de réserve”, il transforme la contestation légitime de sa politique en “faute professionnelle”. Que les élus des grandes villes, à la longue, finissent presque tous par basculer vers l’autocratisme n’est certes pas nouveau. Mais un tel dérapage survenant deux ans seulement après une première élection n’annonce rien de bon...

Certes, des spectacles ont pu déplaire à la droite, tel que l’antifasciste et anticlérical “Maria Republica” (celui-n’était pourtant programmé qu’à Nantes !). Mais le rejet de l’ANO par cette droite est plus profond et on peut craindre d’autres attaques contre la vie culturelle angevine. Tout ce qui peut donner à réfléchir, à ne pas être que consommateur de divertissements est en réalité dans le collimateur. La lingua capitalistis imperii n’a de cesse de nous inonder de slogans prétendument “réalistes” pour nous faire accepter l’inacceptable. Au nom des équilibres de lignes budgétaires savamment isolées les unes des autres, le pouvoir détruit peu à peu la culture commune et tout ce qui fonde une vie collective indépendante des grandes firmes capitalistes (notamment, celles de l’industrie culturelle). Aussi, la défense de l’opéra angevin, qui peut paraître au prime abord anecdotique à qui n’a pas l’habitude ou la possibilité de se frotter à l’art lyrique, est un enjeu pour toutes celles et tous ceux qui refusent le monde étriqué et mortifère dans lequel la classe capitaliste et ses domestiques politiques PS-UMP-FN veulent nous enfermer.

Le NPA49 condamne les choix budgétaires de la ville d’Angers et appelle les Angevines et Angevins à être solidaires du directeur général de l’ANO.

24 septembre 2016, par NPA 49

[1] Comme si par ailleurs les spectateurs “étrangers” à la ville ne venaient qu’à l’opéra et n’y dépensaient rien dans les commerces avoisinants à l’occasion de cette venue. Comme si, également, des habitants d’Angers n’allaient parfois à Saumur assister à des spectacles subventionnés par la ville de Saumur ! Même d’un point de vue capitaliste, la logique strictement comptable a ses limites !