Gilets jaunes : le mouvement social doit s’engouffrer par la porte entrouverte

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Ce samedi 1er décembre marque une nouvelle étape dans la mobilisation protéiforme des gilets jaunes. Le matin, alors que 300 d’entre eux défilaient dans les rues d’Angers (des actions ayant également lieu à Segré et dans le Saumurois), une AG d’environ 150 militant.e.s syndicaux de la CGT, auxquels s’étaient joints quelques syndicalistes de la la FSU et des jeunes de l’UNL et de l’UNEF débattaient à la bourse du travail de l’attitude syndicale à adopter face à un mouvement d’évidence populaire mais souvent contradictoire et parfois confus quant à ses objectifs.

Le débat de l’AG a été vif et tranché.

Certain.e.s militant.e.s, très minoritaires dans les interventions, ont affiché leur défiance vis-à-vis des gilets jaunes et leur souhait de ne s’impliquer que dans les actions de la CGT. La présence de militant.e.s d’extrême droite dans les rangs des gilets jaunes comme les réflexions homophobes ou racistes de certains d’entre eux suffisaient à leurs yeux à justifier de ne pas aller au devant des gilets jaunes pour débattre avec eux, et encore moins à chercher quelque convergence de lutte que ce soit.

À l’inverse, la majorité des intervenant.e.s a mis en avant le caractère populaire, composite et inédit des gilets jaunes, qui justifient d’aller à leur rencontre, sans leur imposer pour autant l’étiquette syndicale de façon sectaire. Plusieurs ont souligné que, si quelques fascistes sont bien à la manœuvre, plus ou moins nombreux selon les endroits, c’est une raison de plus pour ne pas laisser ces renards enragés agir en toute liberté dans le poulailler. De façon irresponsable, le gouvernement et une partie des médias mettent en avant ces ennemis de la classe ouvrière pour déconsidérer les gilets jaunes, au risque d’offrir aux organisations fascisantes et fascistes l’occasion de récupérer le mouvement à leur profit. Il faut au contraire aller discuter avec les gilets jaunes et chercher un terrain commun d’action qui ne peut que marginaliser les fascistes. D’ailleurs, depuis le lancement du mouvement, les revendications sociales et l’opposition au gouvernement ont largement pris le pas sur la revendication initiale de refus de la surtaxation des carburants (ainsi, la dénonciation de l’injustice fiscale, plutôt que la fiscalité elle-même, ou l’exigence du rétablissement de l’ISF). Des exemples ont aussi été donnés où les militant.e.s syndicaux et leurs analyses ont été très bien accepté.e.s parmi les gilets jaunes.

Par ailleurs, dans ce contexte influencé par le mouvement des gilets jaunes, un réveil des luttes a pu être mis en évidence lors de l’AG : lutte victorieuse à la clinique St Didier d’Avrillé (voir notre article), mobilisations lycéennes contre les réformes du Bac et du lycée (encore en phase de démarrage à Angers), lutte à prévoir contre la hausse dramatique des frais d’inscription à l’université (en voie de marchandisation accélérée), luttes dans le secteur de l’énergie, etc.

Si le débat va se poursuivre, car les positions des uns et des autres évoluent très vite face à la profonde crise de légitimité du macronisme, cette AG a certainement été le signe d’un regain de combativité parmi les militant.e.s. Nul doute qu’il va falloir la déployer dans les semaines à venir. Car l’enjeu est de taille : c’est toute la politique productiviste de régression sociale et de rapines du gouvernement des riches actuellement au pouvoir qu’il faut bloquer. À leur manière politique balbutiante mais spontanée, les gilets jaunes ont rouvert la porte des luttes. Il faut maintenant que le mouvement social et écologique s’engouffre dans la brèche.

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Annexes :
-  Communiqué du NPA national : Gilets jaunes : continuer la mobilisation contre la vie chère
-  Intervention d’Olivier Besancenot à ONPC le 1er décembre sur France 2 (enregistrée jeudi 29 novembre).
-  Images de la manifestation des gilets jaunes du matin [1] (gare et boulevards) :

1er décembre 2018, par NPA 49

[1] L’après-midi, la manifestation des gilets jaunes a doublé de volume et repris ses déambulations. Il n’y a eu aucun incident, en dépit de la volonté policière (en fait, de la préfecture) quelque peu provocatrice de barrer l’accès à la gare, à l’intérieur de laquelle les gilets jaunes avaient pacifiquement défilé le matin.